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Publié le 18/12/2019

Un troisième « droit de propriété » pour faire baisser le prix d’achat des logements privés

©Stéphanie Tétu pour Habitat en Région

Une proposition de loi du député Jean-Luc Lagleize veut élargir au logement privé, le mécanisme créé par la loi Alur pour favoriser la production de logements en accession sociale.

Pour favoriser l’accession à la propriété des logements sociaux, la loi Alur, votée en 2014, avait créé les organismes de foncier solidaire (OFS). Le principe, le bailleur social reste propriétaire du terrain et vend au locataire la propriété du bien. Résultat : des prix de vente divisés par deux par rapport au prix du marché.

Neuf organismes de foncier solidaire (OFS) ont été agréés fin 2018 et une vingtaine est en projet pour quelques milliers de logements construits.

L’idée du député est d’étendre ce mécanisme à tous les logements également privés, via des organismes de foncier libre (OFL), en généralisant un "nouveau droit de propriété" qui permet de posséder ses murs mais pas le terrain sur lequel est construit le logement.

Une fois n’est pas coutume, il n’aura fallu que quelques semaines pour passer de la théorie à la réalité.

À l’automne, dans un rapport commandité par le Premier ministre, Jean-Luc Lagleize recommandait de séparer le foncier du bâti dans les zones tendues. Le terrain resterait alors aux mains d'organismes "fonciers" publics.

L’objectif était clairement indiqué dans le titre du rapport « casser l’engrenage de la hausse des prix ». « Actuellement, tout le processus de l’acte de construire pousse à construire toujours plus cher », expliquait-il. Une flambée alimentée par les particuliers qui « veulent réaliser une plus-value lors de la cession de leurs biens en profitant des investissements réalisés par la commune ». Mais les pouvoirs publics eux aussi « participent de cette spirale délétère via le mécanisme d’enchères publiques sur leurs biens fonciers et immobiliers afin de les attribuer au plus offrant ». « Les ventes aux enchères multiplient les prix par trois et ensuite, par un effet cliquet, ils ne redescendent jamais » rappelait Jean-Luc Lagleize, l’auteur du rapport.

Un nouveau droit de propriété ?

Convaincant ? Plutôt. Quelques semaines plus tard, l'Assemblée nationale a adopté le texte du même député MoDem Jean-Luc Lagleize qui vise à généraliser un "nouveau droit de propriété", en permettant de posséder les murs mais pas le terrain.

Ce troisième droit de propriété, dissociant le bâti du foncier, prend sa place aux côtés de la propriété classique foncière et celle par démembrement qui sépare la nue-propriété et de l’usufruit (l’usage du bien)

Comment cela va-t-il se passer concrètement ? C’est le gouvernement qui devra préciser les modalités. L'exécutif s'est laissé une marge de manœuvre pour adapter, si nécessaire, le statut du bail réel immobilier et des autres régimes (bail emphytéotique, bail de construction, etc.), qui ne satisfont pas encore tout à fait les exigences du texte.

Le ministre du logement, Julien Denormandie, s'est toutefois engagé à « travailler sur la rédaction de ces ordonnances au plus vite, pour que celles-ci soient prêtes au moment de l'adoption définitive de la loi, à l'issue de son cheminement législatif ». Celui-ci reprendra normalement dès le premier trimestre 2020, au Sénat.

Les premières propositions

En attendant, le texte propose donc, en premier lieu, de commencer par « interdire la vente aux enchères lors des cessions de foncier public » au profit de cessions « de gré à gré », après estimation du prix par France Domaine. Et ce dès 2021.

Et « pour stopper définitivement la spéculation foncière », la loi propose de généraliser la dissociation du foncier et du bâti. Concrètement la propriété du terrain resterait dans les mains d’organismes fonciers. L’acheteur d’un bien serait donc propriétaire des « murs » mais resterait définitivement locataire du terrain.

Mais seulement dans les zones tendues dans un premier temps, là où la demande est supérieure à l’offre de logements. « L’office foncier va donner à un constructeur (promoteur, aménageur, bailleur social), par un bail emphytéotique à durée illimitée, un droit à construire un programme particulier (logements, commerces, équipements publics). » L’office achète pour toujours le terrain. Le foncier n’étant désormais plus jamais en vente, il ne peut plus faire l’objet de spéculation.

Si certains dénoncent déjà la mort du « droit de propriété », le législateur a pris la peine d’argumenter que la mesure n'enfreindrait pas la Constitution car elle va se concentrer sur les zones tendues, au motif de "l'intérêt général". Un argument  qui peut prêter à débat quand on sait que l’encadrement des loyers à Lille ou à Paris a été annulé par le Conseil Constitutionnel, pourtant justifié par les mêmes raisons.

Les observateurs rappellent que le dispositif redonnera surtout du pouvoir aux maires. Le texte prévoit qu’ils pourront saisir une instance d’appel si le prix proposé par France Domaine ne leur convient pas. En outre, l’observatoire du foncier, nouveauté créée par le même texte, leur fournira des données sur le marché.

D’ailleurs, certains élus se sont déjà engouffrés dans la brèche. Il est clair que la question du foncier et la maîtrise du son prix préoccupe les élus. D’ailleurs à Paris, l'adjoint au logement à la mairie de Paris, Ian Brossat, a annoncé en août un dispositif identique pour permettre de "diviser par deux le prix de l'accession à la propriété", alors que le prix moyen au mètre carré dans la capitale a franchi le seuil des 10 000 euros. Les 500 premiers logements, dont la livraison est prévue en 2022, seront bâtis dans les XIIIe, XIVe, XVIIIe et XXe arrondissements de Paris et vendus à des familles sous condition de revenu, à environ 5000 euros du mètre carré pour une période de 99 ans.

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